Lundi 5 Janvier 2009, atterrissait dans les brousses de Kidal un avion spécial de type « Kaza ». Ils ne sont pas nombreux les avions à atterrir par là. En plus du fait que c’est une zone de rébellion, malgré une forte mobilisation de l’armée nationale dans la région, les avions adaptés à ce genre de terrain sont recherchés. Raison pour laquelle, il a fallu attendre que l’Algérie apporte au nom de la médiation qu’elle exerce dans la crise du nord, cet avion approprié pour un vol de trois heures au plus, pour rallier Kidal.
A bord du « Kaza » algérien se trouvait la délégation officielle malienne, à la tête de laquelle se trouvait le ministre de l’Administration territoriale et des Collectivités locales, Kafougouna Koné. Aux côtés de ce Général de l’Armée malienne, prenaient place l’Ambassadeur de l’Algérie au Mali Abdelkrim Gheraieb, le conseiller consulaire du Mali à Djeddah, Iyad Ag Aghaly et des membres du Comité de suivi de l’accord d’Alger du 4 juillet 2006. Tous s’étaient rendus dans la capitale des Ifoghas pour être témoins, mais aussi des acteurs du retour des frères qui s’étaient rebellés contre leur pays, en prenant les armes contre l’armée nationale. Mais cet événement tournera court, car les rebelles avec à leur tête, le Lieutenant- Colonel Hassane Fagaga et Bâ Moussa Ag Mossa, ne viendront plus à Kidal. Ils retourneront dans leurs bases, dans les montagnes où l’armée malienne n’a pas accès.
Ces rebelles de l’Alliance du 23 mai pour le changement avaient manifesté leur volonté de revenir dans l’armée, après plusieurs années de rébellion pour certains d’entre eux. Ainsi, les groupes armés de plus de 300 éléments ont bivouaqué pendant trois jours, à cinq kilomètres de Kidal, attendant d’être réintégrés dans l’armée. Ce processus de paix avait été salué par tous, et le Colonel Kadhafi en visite au Mali, le week end dernier (du 3 au 5 janvier) en a fait ses choux gras dans la déclaration qu’il a faite à la presse, « les rebelles vont quitter les montagnes pour venir dans l’armée ».
C’est lorsqu’il a été question pour les rebelles de rejoindre la ville de Kidal que le problème s’est posé. Une question qui peut paraître au prime abord comme un simple détail loin d’être l’essentiel, a finalement été la cause du clash. Hassane Fagaga et Ba Moussa, à la tête des 300 combattants ayant opté pour l’intégration dans l’armée ignoraient que le Commandement de l’armée malienne leur demanderait de rendre leurs armes avant de rentrer dans la ville de Kidal. L’armée a voulu donc que le passage au Check- point (poste militaire) à l’entrée de Kidal soit fait haut-les-mains, pour ses éléments rebelles.
Mais tel n’était pas l’avis des groupes armés qui ont estimé qu’ayant librement adhéré au processus de paix et ayant décidé d’intégrer l’armée, ils pouvaient venir avec leurs armes à Kidal et procéder ensuite au cantonnement. Les rebelles ont refusé de traverser le poste militaire à l’entrée de Kidal, les bras ballants comme s’ils avaient été capturés, alors qu’il n’en est rien. De leur côté, les militaires ont-ils vu humiliant que de laisser les rebelles entrer à Kidal les armes bravement dans les mains ? Ou bien ont-ils cru qu’une fois dans la ville, les rebelles allaient ouvrir le feu et essayer de contrôler la ville ? Cela est peu probable compte tenu du fait que la ville de Kidal est sous contrôle des hommes du Colonel Gamou.
Selon des sources bien informées, il y a en sourdine des problèmes d’appartenance ethnique. Les Ifoghas auraient exigé que le Colonel Gamou qui est Imrad quitte le commandement, d’où un problème ethnique qui se greffe à celui du check point à l’entrée de Kidal. Ce problème n’ayant pas eu une solution, malgré l’implication du Médiateur, le retour des rebelles dans l’armée a été reporté sine die. La rébellion une fois de plus vient d’infliger une ultime humiliation à notre vaillante armée en venant bivouaqué trois jours durant à la porte de Kidal, à portée de main ; ils sont repartis tranquillement sans que l’armée puisse faire quoi que se soit contre les assaillants d’Abeibara, d’Aguel-Hoc, de Diabali et Ansongo etc…
De quelle humiliation parle-t-on donc que l’arrivée des rebelles avec leurs armes, provoquerait ? En tout cas c’est à une vraie guerre psychologique que militaires et rebelles se sont livrés, sans laisser aucune chance à la médiation de colmater les brèches dans l’immédiat. Mais le facilitateur qu’est Abdelkrim Gheraieb ne lâchera pas prise. Certainement comme à son habitude, la médiation continuera sans désemparer. La délégation officielle partie de Bamako le lundi 5 janvier 2009 devait donc retourner bredouille le mercredi 7 janvier.
Mais pas avant de tenir la réunion d’évaluation de l’accord d’Alger, sous la présidence de Kafougouna Koné et du facilitateur Abdelkrim Gheraieb. Ainsi, il a été décidé de réactiver dans l’immédiat des structures d’animation de l’accord d’Alger. Le comité de suivi a été convoqué à cet effet. Tout sera mis en œuvre pour le retour dans l’immédiat des militaires de l’Alliance du 23 mai pour le changement(ADC) ayant quitté les unités spéciales avec les armes et le matériel de dotation, et la reconstitution de la première Unité Spéciale dès le retour des éléments militaires de l’ADC.
Les trois parties (gouvernement malien, l’Algérie et l’ADC) ont exprimé « leur engagement à préserver la quiétude qui règne sur le terrain et à poursuivre l’application pleine et entière de l’accord d’Alger ». Les participants ont rendu hommage à Abdelaziz Bouteflika pour les efforts inlassables en faveur de la restauration de la paix et de la sécurité et au développement de la région de Kidal. L’Ambassadeur Abdelkrim Gheraieb poursuivra sa mission de facilitation pour amener les rebelles à rentrer au bercail.
Source: Le Républicain