Tuesday, October 6, 2009

Burkina Faso: Contre le hooliganisme des forces de défense et de sécurité

Jugez-en vous aussi ! Il suffit dans ce pays, d’appartenir à un corps organisé: nouvelles recrues dans l’Armée nationale, police, compagnie de sécurité, pour se croire supérieur à toutes les autres composantes de la Nation, et de ce fait être intouchable, même si l’on vient à se rendre coupable d’un acte ignoble, d’un acte que réprouve la société. A la moindre altercation avec un autre citoyen du corps social, l’individu se réfère à son groupe d’appartenance pour organiser une descente punitive. La horde appelée à la rescousse se livrant à des casses et autres comportements injustifiables contre les autres et contre leurs biens. Elle se conduit comme si elle avait reçu la mission de libérer un des leurs des mains d’un ennemi. C’est bon que soit cultivé l’esprit de corps dans un groupe social. Chaque membre doit, pour se sentir en sécurité, avoir le sentiment qu’il fait partie d’un corps respecté et craint pour ses vertus et son refus de l’arbitraire. Seulement, cet esprit de corps, ce sentiment de faire partie d’un corps ou d’une profession ne doit pas se manifester quand il est question de casser et d’exercer des actions de violence sur d’autres membres du corps social qui eux, n’en font pas partie. Si l’esprit de corps devait se limiter à des actions de banditisme, à de comportements de hooligans, c’est mieux de ne pas le cultiver, ni le développer. Dans ce cas, l’instinct de corps devient nocif, destructeur et ravageur. Il constitue un danger pour tous les autres corps. Il aura suffi d’une simple bagarre opposant deux individus: un citoyen civil et un élève assistant de police dans un maquis du secteur n° 9 de Ouagadougou, pour que l’ensemble de la promotion 2008-2010 organise une descente punitive au cours de laquelle elle a molesté, violenté et cassé tout ce qui se trouve dans ledit maquis et aux alentours. Devant la riposte organisée par la population pour se défendre contre « ces justiciers » d’une autre époque, mais aussi devant les condamnations unanimes de cette équipée des élèves assistants de police, le ministre de la Sécurité s’est trouvé contraint de prendre des mesures tendant à décourager à l’avenir de tels agissements. C’est une des rares fois que l’autorité réagit publiquement et promptement face à ces drames dont se rendent coupables des éléments des forces de police et de défense. Si des mesures semblables, si des mesures courageuses avaient été prises chaque fois que des éléments d’un corps donné se comportaient comme les élèves assistants de police, il y a longtemps que ces dérives préjudiciables à la paix sociale seraient terminées.

Les mesures prises par le ministre de la Sécurité prévoient entre autres: l’exclusion temporaire de tous les élèves assistants de police de la promotion 2008-2010; des retenues sur leur pécule aux fins de réparation des dommages qu’ils ont causés au cours de leur équipée punitive et la création d’une commission d’enquête dont le but est de statuer avec précision sur les implications des uns et des autres dans ce douloureux incident. La commission d’enquête devra aussi évaluer les dommages subis par les victimes. Voilà qui va donner à réfléchir à des hommes qui avaient pour mission primordiale de défendre et non d’agresser. Nous estimons que les retenues sur pécule seront proportionnelles au montant des dommages engendrés lors de cette descente punitive. Les retenues devront durer le temps nécessaire pour couvrir tous les dommages de quelque nature qu’ils soient. Il n’y a pas de doute qu’une telle mesure, si elle est appliquée avec rigueur et efficacité va dissuader de nombreux futurs « justiciers ».

Plus que l’impact des mesures sanctionnant des comportements qui sont indignes de la police, il faut s’interroger sur le passé des personnes qui ont pu se laisser aller à de telles extrémités. Nous avons toujours cru qu’avant d’être admis dans un corps comme la police et la gendarmerie, les services compétents dans ces corps menaient des enquêtes approfondies sur les candidats admis. Si cela est vrai, les enquêtes devraient permettre de connaître la personnalité de celui qui a été recruté; si moralement et socialement il est apte à servir dans la police avec les contraintes inhérentes à ce métier. C’est pourquoi, il est difficile de comprendre que des hommes qui, à l’issue de leur formation recevront comme mission principale la protection du citoyen et de ses biens, se soient conduits de la sorte. Si l’on incorpore dans la police des délinquants et des voleurs qui écumaient leurs quartiers et leurs villages, il n’y a aucun doute que tôt ou tard leur tendance première reviendra au-dessus à la moindre occasion. Dans un article consacré aux concours directs de la Fonction publique session 2009, nous avions écrit: « Pas de voleurs à la Fonction publique ».

N’ayons pas peur de le dire : ce sont généralement des élèves qui ont des parents proches des forces de sécurité qui prennent la tête de ce genre de manifestations. Ce sont également eux qui rendent la vie impossible au corps professoral. Ils sont des éléments qu’on ne peut pas sanctionner à cause du parapluie qui les protège. Ces élèves sont loin d’avoir la moralité et la droiture de leurs parents. Ce que nous avons dit n’est pas seulement propre aux écoles de police. Partout, on rencontre des reçus à un examen qui ont été « parachutés ». Le plus souvent, c’est leur impolitesse et leur arrogance qui le disent. Nous osons écrire aujourd’hui comme à la Fonction publique: « Pas de délinquants et de drogués à la Police nationale ». Ils sont un danger pour la tranquillité sociale.

Par Sidzabda

Source: Le Pays (05/10/2009)

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