L’armée reste un important vivier de présidents. Sur les cinquante-trois pays que compte le continent, dix-huit sont dirigés par des « galonnés », qu’ils aient été militaires de carrière ou qu’ils aient servi dans les rangs d’une rébellion. Et, parmi eux, certains font preuve d’une belle longévité. Le plus ancien, Mouammar Kaddafi, célébrera le 1er septembre prochain le 40e anniversaire de son accession à la tête de la Libye. Quant à l’Équato-Guinéen Teodoro Obiang Nguema et au Congolais Denis Sassou Nguesso, cela fait trente ans qu’ils ont conquis le pouvoir. Le premier a renversé son oncle, Macias Nguema, le 3 août 1979. Le second a été élu président du Parti congolais du travail (PCT) le 5 février 1979, devenant de facto le président de la République. Vaincu à la présidentielle de 1992, il connaîtra cinq années de traversée du désert et une guerre civile avant de renouer avec la magistrature suprême, en 1997.
Autre anniversaire, celui de l’accession au pouvoir du général soudanais Omar el-Béchir le 30 juin 1989. Il deviendra officiellement président en 1993. Formé à l’Académie militaire du Caire, El-Béchir est un véritable combattant, qui a même servi dans l’armée égyptienne pendant la guerre contre Israël en 1973. Aujourd’hui encore, il s’appuie sur l’armée, et son régime reste très militarisé.
Pouvoir kaki
Si la « militarisation » d’un régime est souvent très sensible dans les mois qui suivent la prise du pouvoir, elle finit, avec le temps, par s’estomper. C’est notamment ce qui s’est passé au Burkina, où Blaise Compaoré, compagnon d’armes de Thomas Sankara, va mener la « rectification » après la mort de ce dernier le 15 octobre 1987. Les références révolutionnaires vont peu à peu disparaître, et les hommes en treillis déserter les allées du pouvoir pour regagner les casernes.
D’autres présidents restent liés à leur corps d’origine, ne serait-ce que parce que les circonstances les y obligent. C’est le cas au Tchad d’Idriss Déby Itno, qui a encore revêtu son treillis quand les rebelles soutenus par le Soudan ont tenté de le renverser, en février 2008. Diplômé de l’École supérieure de guerre de Paris, le commandant en chef de l’armée prit la tête du mouvement qui chassa Habré de N’Djamena en 1990. En Centrafrique aussi, l’exécutif conserve une teinte très kaki. Il est vrai que François Bozizé, qui a renversé Ange-Félix Patassé en mars 2003, était auparavant le chef d’état-major des armées. Plus récemment, deux militaires de carrière ont accédé au pouvoir. Le 6 août 2008, en Mauritanie, le général Mohamed Ould Abdelaziz a renversé Sidi Ould Cheikh Abdallahi. En revanche, en Guinée, c’est un officier de grade plus modeste, le capitaine Moussa Dadis Camara, qui a pris la tête de la junte formée après le décès du président Lansana Conté, le 23 décembre 2008.
Si beaucoup sont issus de l’armée régulière, d’autres ont fait leurs classes dans le maquis, comme l’Éthiopien Mélès Zenawi, et son frère ennemi érythréen, Issayas Afewerki. Paul Kagamé et Joseph Kabila sont deux autres « présidents rebelles ». Le premier, qui a pris Kigali à la tête du Front patriotique rwandais (FPR) le 4 juillet 1994, a d’abord été ministre de la Défense avant de devenir chef de l’État en avril 2000. Le second, qui accéda au pouvoir en janvier 2001, a occupé les fonctions de « commandant des opérations » au sein de la rébellion anti-mobutiste en 1996. Après des études militaires à Pékin, il devient chef d’état-major de l’armée de terre en 2000, avant de succéder à son père assassiné. Il sera légitimé par les urnes en octobre 2006.
Enfin, une dernière catégorie doit être mentionnée, celle des officiers devenus présidents dans le strict respect de la Constitution. Parmi eux, deux sont en fonction. Le Nigérien Mamadou Tandja a été élu en 1999 et réélu en 2004. Enfin, le président malien Amadou Toumani Touré constitue un cas particulier. En mars 1991, il a pris la tête du pays lors du putsch contre Moussa Traoré. Après quoi il a organisé une conférence nationale, puis des élections législatives et présidentielle en 1992. À l’issue de cette transition, il a remis le pouvoir aux civils et quitté la scène nationale. Jusqu’à ce qu’il décide de se porter candidat à la présidence du Mali en 2002. Non sans avoir préalablement obtenu sa mise en retraite anticipée de l’armée.
Source: Jeune Afrique
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